Un aspect central de la psychothérapie intégrative est qu’aucune forme de psychothérapie n’est meilleure, ni même adéquate, dans toutes les situations. L’objectif de l’intégration est de s’inspirer de la riche variété des sources disponibles pour les cliniciens, dans le meilleurs intérêt du client. Le terme "intégratif" peut se référer à la combinaison en une nouvelle entité de deux ou plusieurs approches différentes de la psychothérapie, ou il peut se référer à un méta-système intégré liant la théorie à la pratique clinique, et basé sur des principes généraux à propos de la psychothérapie et du procesus de changement.
L’intégration a évolué en réponse aux besoins des cliniciens qui souhaitaient découvrir des manières plus efficaces d’aider leurs clients ; elle a pour objectif de combiner des éléments de différentes approches et écoles de thérapie. Cependant, l’intégration a aussi évolué en partie à partir d’une réponse aux manques perçus dans les approches psychothérapeutiques, tels que :
La longueur de la psychanalyse, bien que facilitant le dévoilement des processus inconscients et le développement d’une prise de consience, peut ne pas mener à des changements de comportement ;
La thérapie comportementale, en se concentrant sur des changements spécifiques de comportement souhaités, peut arriver à un soulagement du symptôme sans toutefois aborder le problème sous-jacent, menant au phénomène de la substitution du symptôme ;
Les thérapies humanistes, en mettant l’accent sur le potentiel de croissance de l’être humain, ont pu être perçues comme trop optimistes et minimisant l’aspect de l’ombre et les réalités existentielles de l’être humain.
Stricker et Gold (1966) écrivent à propos de trois approches différentes de l’intégration : l’intégration théorique, l’éclectisme technique et l’approche des facteurs communs.
L’intégration théorique : la vision idéale optimiste mais utopique.
Ceci se réfère à la création d’un méta-modèle de thérapie, ou d’une thérapie des thérapies. La tentative de créer de tels modèles d’intégration méta-théoriques a été considérée comme impossible par certains et comme grandiose par d’autres. Cependant, plusieurs modèles méta-théoriques ont été développés et se sont révélés un excellent soutien pour les cliniciens, en leur fournissant un plan d’ensemble sur lequel baser leur pratique intégrative.
Eclectisme technique : la vision pragmatique et adaptive mais incomplète.
L’éclectisme se rapporte à des formes d’intégration basées sur l’expérience et qui se concentrent sur ce qui marche avec un client particulier, pour un problème particulier. Les approches éclectiques varient de l’hasardeux à l’arbitraire, en passant par l’idiosyncrasique, jusqu’aux modèles de sélection de traitement systématiques et validés empiriquement.
Les facteurs communs : un compromis logique mais une vision peut-être restreinte ?
La recherche de facteurs communs à travers les différentes écoles psychothérapeutiques date des années 1930 ; depuis lors, aussi bien la recherche que l’expérience clinique ont contribué au débat. Dans une certaine mesure ce procesus a pu être entravé parce que nombre de personnes ressentent une loyauté envers leur approche "sous sa forme pure" et ne sont pas particulièrement enclines à démontrer que la méthode qu’ils ont acquise à un certain coû t, tant financier qu’en termes de temps et d’efforts, peut être égalée par n’importe quelle autre en termes de concepts ou de résultats.
Dans un survol de la littérature à ce propos, Goldfried et Padawer (1982, cité par Goldfried, 1995, p. 203) listent, parmi les approches psychothérapeutiques, les domaines communs suivants :
1 - la probabilité, induite culturellement, que la thérapie peut être utile, de telle sorte que la plupart des interventions confirment l’espoir de la personne que la thérapie est, de manière générale, une bonne chose à faire. Yalom (1986) parle de cet aspect comme étant " l’instillation de l’espoir".
2 - la participation dans une relation psychothérapeutique ; c’est à dire que le simple fait d’entrer dans une relation qui soit attentive, pleine d’acceptation et de bienveillance, est en soi bénéfique. Rogers (1951) met l’accent sur cet aspect comme étant l’ingrédient de base de la thérapie efficace, et qui est souvent une expérience unique dans la vie de la personne.
-3 - la possibilité d’obtenir une perspective extérieure sur soi-même et sur le monde ; grâce au feedback que procure la thérapie, la personne peut opérer un changement dans son cadre de référence et est capable de changer sa perception d’elle-même.
4 - l’encouragement à vivre des expériences émotionnelles correctrices ; il semble y avoir un accord que les expériences nouvelles forment un aspect crucial de la thérapie, que celles-ci aient lieu principalement dans le cadre des séances thérapeutiques ou entre les séances.
5 - L’opportunité de tester la réalité de manière répétitive ; ceci inclut une combinaison entre, d’une part, le fait d’obtenir une nouvelle perspective sur soi-même par les feedback externes, et d’autre part, la pratique et la consolidation de nouveaux comportements et de nouvelles réponses dans une atmosphère favorable.
L’information à la base des différentes approches de l’intégration provient de différentes sources : de théoriciens comparant différents pré-supposés de base ; de cliniciens dans le domaine psychothérapeutique qui, graduellement, évoluent vers une pratique plus intégrative ; et de la recherche de résultats en psychothérapie. La comparaison des bases philosophiques de différentes écoles de psychothérapie a contribué à fournir des informations à propos d’un ensemble de pré-supposés philosophiques qui soutendent la pratique, et dont certains sont incompatibles ; elle a aussi mis en lumière certains présupposés communs à différentes approches, par exemple l’accent mis par un certain nombre d’entre elles sur une vision holistique de la personne. Les cliniciens, étant face au défi d’aider leurs clients efficacement, sont souvent les premiers à expérimenter de nouvelles techniques et approches. De nouvelles approches de la psychothérapie ont évolué à partir de ce processus. Une autre source d’information non négligeable dérive de la recherche psychothérapeutique, qui examine les facteurs nécessaires pour un changement thérapeutique efficace.
Article rédigé par : Maria Gilbert, psychologue clinique, MA (Clin Psych), BA (Hons English), directrice du département Psychothérapie Intégrative à l’Institut Métanoïa, 13, North Common Road, Ealing, London W5 2QB, tél. : + 44 20 8579 2505
Adresses utiles : SEPI (Society for Exploration of Psychotherapy Integration)
www.cyberpsych.org/sepi/
Références :
Goldfried. M.R. (1995) from Cognitive-Behavior Therapy to Psychotherapy Integration. New York : Springer Publishing Company.
Rogers, C.R.(1951) Client-Centered Therapy. Boston MA : Houghton Mifflin.
Stricker, G. and Gold, J.R. (1996) Psychotherapy Integration : An assimilative, psychodynamic approach. Clinical Psychology : Science and Practice, 3, 47-58.
Yalom, I.D. (1985) The Theory and Practice of Group Psychotherapy. New York : Basic Books.